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Cet article m’a été inspiré par la disparition de MONSIEUR Violier, dont la mort violente et subite a touché des personnes du monde entier. A cause de sa notoriété, à cause de sa personnalité, à cause de son parcours, tout cela participe à l’étendue de la résonance de son départ soudain. Mais ce qui explique l’ampleur de ce cataclysme c’est sans doute le fait qu’il ait CHOISI de mourrir.

Nous ne sommes pas prêts à faire face au suicide. Nos sociétés ont déjà de la peine à faire face à la mort dite « naturelle », mais que quelqu’un puisse LA choisir c’est bien plus que notre entendement ne puisse absorber. J’ai été très ébranlée par cet évènement, au même titre que bon nombre de mes proches, et j’ai voulu comprendre à quoi cela faisait écho chez moi, chez vous, chez nous tous. Voici en vrac quelques éléments de réponses :

Premièrement, nous sommes presque tous persuadés que « rien de vaut la vie ». Même chez les plus croyants d’entre nous, les plus fervents convaincus qu’un paradis nous attend, la peur de la mort est omniprésente. La recherche, la médecine, les nouvelles technologies, on est tous à l’affût des miracles propres à préserver et prolonger notre existence sur terre.  Alors quand une personne décide de rejoindre l’au-delà de son plein grès, c’est comme s’il avait choisi de pactiser avec l’ennemi commun. Sans parler des messages positifs qu’on nous assène en permanence (moi la première à travers mon blog) à coup de citations et de bonnes paroles qui encouragent TOUJOURS tout le temps au positivisme, qui laissent à penser que non RIEN n’est JAMAIS perdu, qu’en AUCUN cas il ne faut baisser les bras parce que demain sera évidemment meilleur, et que tout est possible pour qui le VEUT VRAIMENT ! Comment l’acte d’un seul homme peut-il soudain rendre ces belles paroles aussi vides de leur substance. Son départ semble avoir emporté nos illusions qu’on a mis temps d’énergie à construire.

Deuxièmement, le fait qu’un homme avec un tel succès, possédant tous les ingrédients de ce que d’aucun pense être le bonheur : de la notoriété, de l’argent, une famille, … puisse passer à l’acte nous ébranle. Soudaine leçon forcée d’humilité : tout le monde, même les célèbres, les riches et les puissants peuvent défaillir… De là à penser, que si cela peut arriver chez lui, il n’y a pas de raison que ça n’arrive pas chez nous, nos proches, chez tous ceux qui, sur le papier, ont une vie bien moins glamour, il n’y a qu’un pas et il est franchi. L’évidence est là. La fragilité dort chez chacun, dans l’ombre et elle est capable de surgir à tout instant… En pleurant sur le sort des autres, c’est souvent au nôtre que nous songeons. La peur de voir notre propre vie vaciller nous submerge soudain.

Troisièmement, l’homme étant par définition rationnel nous avons besoin de comprendre.  Nous disons tous que nous espérons « qu’il ait au moins laisser une lettre pour la famille, pour les proches », mais aussi et surtout pour NOUS ! parce que même face à un acte par essence irrationnel nous avons besoin d’explications. Y en a-t-il toujours ? Est-ce qu’un passage à vide de quelques minutes, une vague de désespoir, un sentiment soudain de perdre pied, est-ce que tout cela s’explique ?

Pour ma part, voilà ce que je retiens de ce départ. Il n’y aura peut-être pas de lettre, pas de version officielle et définitive, pas UNE explication, mais son acte en lui-même nous laisse des messages – ma quête de sens me pousse à m’en convaincre -. A nous de choisir lesquels nous voulons conserver. Personnellement, j’en retire que ce qui peut être un moteur dans notre vie, ce qui peut nous pousser en avant, peut paradoxalement devenir soudain un frein, voir provoquer un arrêt brutal, même parfois définitif. C’est le cas, de ces 3 tendances :

La quête de perfection : Loin de moi l’envie de faire l’apogée du minimalisme, mais heureux ceux qui savent se satisfaire du « bien » sans chercher constamment à faire mieux.   Le fameux « perfectionnisme » défaut alibi préféré de tous en est réellement un. Certes, il nous pousse à nous dépasser, surpasser, mais il crée une telle tension. Pour tenter d’expliquer la disparition de ce grand cuisinier, on évoque volontiers la pression causée par les guides et les classements – désigner un coupable est souvent rassurant – Pourtant elle n’est rien comparée à celle qu’un homme est capable de s’imposer à lui-même. Alors pensons-y et apprenons à relâcher un peu la pression.

La recherche de reconnaissance : ce besoin d’être parfait est souvent étroitement lié à un profond besoin de reconnaissance. Sans toujours le verbaliser, de manière très enfouie et inconsciente, nous sommes nombreux à considérer que les autres nous aiment pour ce que l’ont fait. Alors que le véritable amour consiste à aimer les gens pour que ce qu’ils sont. La soif de reconnaissance est une force relativement universelle, rien de nouveau de ce côté-là. Mais si nous tentions de comprendre de qui nous cherchons la reconnaissance ? Contrairement aux idées reçues, il n’y a pas de bonne réponse. Le fait de faire les choses pour soi, oui évidemment c’est un atout, mais à condition de ne pas être perfectionniste (cf. ci-dessus) et de savoir s’auto-gratifier comme il se doit…autant vous dire que ce n’est pas gagné d’avance. Chercher la reconnaissance des autres, pourquoi pas ? Après tout on encourage les parents à dire à leurs enfants qu’ils sont fiers d’eux, et cette phrase raisonne souvent comme le compliment ultime. Monsieur Violier a dit à plus d’une reprise avoir perdu ses deux « pères » en une année et certains y voient là une explication. Le chagrin de les avoir perdus ? éventuellement. La perte de précieux soutiens ? probablement. Mais au-delà de cela, au-delà de toute la tristesse que peut causer la mort de nos proches, il est des personnes qui sont des piliers dans nos vies. Des personnes qui nous donnaient envie de nous dépasser, celles auxquelles on avait hâte d’annoncer nos réussites, celles dont on cherchait … la reconnaissance. Il se peut que la disparition d’une de ces personnes suffise à remettre en question le sens de toutes nos actions, tout simplement parce qu’elles ne sont plus là pour les voir et nous en féliciter.

La recherche de la réussite : Sans nier que l’esprit de compétition est un puissant moteur, il faut constater qu’il a aussi ses effets pervers. Je citerai ici les propos de Mme Genecand qui évoque le suicide de M. Violier dans le TEMPS : « Le succès en tant que renommée constitue donc un danger. Il faut être à la hauteur, assumer. C’est l’histoire de la menace, de l’épée. Mais le succès en tant que réussite personnelle, est, pour certains, tout aussi difficile à négocier. Quand on a l’esprit de conquête, atteindre son objectif peut marquer le début de la fin. La pole position se renouvelle, se réinvente, s’entretient. Mais le frisson n’est plus le même. Il y a pour eux, dans le royaume du maintien, quelque chose d’éteint. » En se voyant nommé MEILLEUR CUISINIER DU MONDE, M. Violier a atteint le sommet. Que pouvait-il espérer de plus après cela ? Pour ceux qui ont un tel goût du défi, du challenge, de la perfection, le vertige d’être arrivé au sommet et de ne plus pouvoir aller plus haut, c’est sans doute cela qui peut donner envie de se jeter dans le vide…parce que c’est le seul chemin, parce que soudain on a l’impression d’être arrivé au bout du voyage, parce que l’ennui peut vite nous guetter quand on est seul au sommet d’une montagne, parce que plus haut que le sommet de la montagne, il n’y a plus que le ciel…
Le chemin qui mène à la réussite est finalement parfois plus passionnant, plus riche, plus stimulant, plus excitant et vibrant que la réussite en elle-même. Monsieur Violier a eu un magnifique et fulgurant parcours, doit-on regretter qu’il soit arrivé si vite à destination ?

Alors pour éviter de sentir ce vertige qui nous guette dans une moindre mesure quand nous parvenons au milieu de notre vie  – quand nous constatons avoir atteint la plupart de nos objectifs : une famille, une maison, une bonne situation -… gardons à l’esprit cette parole très sage :  « La réussite n’est pas un but, c’est une conséquence. »

 

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